Des gladiateurs à vélo

La sortie était prévue depuis longtemps et attendue avec impatience, pour rejoindre nos collègues des autres sections de l’ASCMCIC à l’hôtel Saigerhöhe, au-dessus du Titisee en Forêt Noire.

 

Du Wacken au Titisee par Matthieu Fargetton…

Une première moitié en plaine, suivie de quelques grimpettes, et le tour était joué ! Du moins c’est ce qui était prévu… Nous savions depuis plusieurs jours que la météo ne serait pas favorable, nous avions même prévu de raccourcir un peu le parcours en cas de grosse intempérie. Mais en ce samedi 27 avril 2019 au matin, c’est bien du Wacken que nous avons décidé de nous lancer pour ce qui n’allait pas tarder à devenir une grande aventure !

Départ à 9h sous une pluie fine, qui n’allait pas tarder à s’arrêter à peine arrivés en Allemagne via le Pont Pflimlin. Les jolies pistes cyclables allemandes nous accueillaient à bras ouverts, et le soleil commençait même à pointer le bout de son nez… « qui a dit qu’il allait faire moche, hein ? franchement on aurait regretté de pas venir… ah ah ah !! » Et ainsi de suite via Offenburg, Gengenbach, Haslach-im-Kinzigtal (à l’écrit OK mais va prononcer le nom du bled…) jusqu’à la pause déjeuner vers le kilomètre 70 où nous attendait un couple de mariés en train de prendre des photos, au bord d’un petit étang bordé de cerisiers et de pommiers, en compagnie de quelques canards et surtout de ravissantes demoiselles d’honneur que nous saluâmes avec tout le tact et la délicatesse dont sont capables cinq cyclistes gonflés aux testostérones… Qu’est-ce qu’on se marrait à ce moment-là !

C’est quelques kilomètres plus loin que les choses sérieuses ont commencé. Nous savions que la route ne tarderait pas à s’élever… mais alors à ce point ! Premières rampes à 13-14% sur une jolie route de montagne, un petit replat où nous passons devant une petite ferme. Encore vaillants, nous saluons le fermier, qui nous répond d’un air un peu énigmatique, du style « héhé les gars, vous savez pas ce qui vous attend… » Effectivement, le passage qui suivait était tout simplement le plus raide qu’on ait jamais vu, puisque l’inclinomètre en temps réel est quand même grimpé jusqu’à 24% !!! Tu tires à peine sur le guidon, la roue avant se lève…tu t’avances trop sur la selle, c’est la roue arrière qui patine… Premier sommet atteint, grandiose et déjà inoubliable, alors que la météo nous avait encore presque épargnés.

La porte de l’enfer s’est alors ouverte et nous l’avons franchi sans hésiter une seconde… première descente sur les freins en raison des rafales de vent qui secouaient dangereusement le vélo et le bonhomme, et peu de temps après, la pluie faisait son retour et n’allait plus vraiment nous quitter. Pas de souci, on est bientôt arrivés ! Euuuh oui, mais en fait… pas du tout ! Une longue ascension dont le pourcentage augmente progressivement, et le GPS qui fait encore le fier nous dit « tournez à droite, continuez à monter »… mais voilà, il fallait bien que ça arrive…plus de route ! c’est un chemin de terre qui se présente à nous ! Les sourires commencent à se crisper autant que les mains sur les guidons, et on comprend rapidement la galère qui nous attend. Il faut sortir de là, retrouver une route, une vraie ! Et avec l’aide d’un autre fermier, on la retrouve, heureusement. Mais les montagnes russes continuent, avec la pluie et les rafales de vent, jusqu’à ce que nous parvenions à la crête. C’est dans la descente qui suivait  que nous avons compris qu’on était plus dans une petite galère, mais vraiment en enfer, quand le grésil a remplacé la pluie et est venu nous fouetter les joues, comme pour nous faire comprendre que nous n’étions que des cyclotouristes inconscients sortis du Kochersberg, et qu’on avait rien à faire là !!

Trempés jusqu’à l’os, frigorifiés, quasiment perdus, les meilleurs pratiquants de langue de Goethe de notre fine équipe ont même eu du mal à comprendre les indications des riverains, tant leur accent de la Schwarzwald était à couper au couteau… au moins autant que les nuages qui assombrissaient et endurcissaient notre périple ! Tant bien que mal, nous avons fini par trouver la direction de Titisee Neustadt… et l’espoir renaissait… « on y est presque les gars ! » Ouais ouais, on y croit ! Mais au fait les mecs, l’hôtel est à Saig, pas ici !! Et Saig… c’est où ??? « Rechts, Rechts !! »… tellement de fois à droite qu’on tourne en rond, et trois kilomètres de plus au compteur !! Mais une fois de plus, on arrive à s’échapper de cette spirale infernale pour atteindre le parc aquatique de Badeparadies… Un paradis ? sans doute pour ceux qui y arrivent en voiture et vont faire trempette. Mais nous, ça faisait trois bonnes heures qu’on faisait trempette dans notre propre jus, nos chaussures étant devenues des petites piscines à l’eau glacée, et c’est grelottants et transis que nous avons attendu les indications suivantes…

Ca y est, Saig, on sait ou c’est ! Facile, juste une (petite) route nationale pour s’élever au-dessus du Titisee…  c’est en file indienne derrière le chef, pour éviter de se faire percuter, que nous avons attaqué la (presque) dernière ascension. Allez, un virage à gauche ultra dangereux, encore une belle montée, une dernière hésitation, un demi-tour, une piste cyclable, et soudain, bien plus haut sur notre gauche… l’hôtel ! Il nous restait seulement à traverser le village de Saig, ou plutôt grimper à son point culminant, pour enfin pouvoir poser pied à terre, définitivement, après 140 km, presque 2000m de dénivelé positif, 7 heures de pédalage qui resteront pour nous tous comme l’une des journées les plus dures qu’on ait connu sur le vélo.

 Un énorme bravo à nous cinq (Laurent Martz, Laurent Ulrich, Nicolas Freund, Jean-Georges Donius et Matthieu Fargetton), on peut vraiment dire qu’on s’est battus contre les éléments et qu’on a gagné ! Et un grand merci à la bonne étoile qui a veillé sur nous au-dessus des nuages, pour nous permettre d’arriver sains et saufs, et même sans ennui mécanique, au terme de cette journée dantesque, qui restera, au-delà du défi sportif, une aventure humaine grandiose dont nous nous souviendrons toujours.

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